Patrick Bélanger
Article en référence: https://i.redd.it/mqsb5la7xvqe1.jpeg
OpenAI vient de mettre à jour son modèle de génération d’images, et selon plusieurs utilisateurs de Reddit, cette nouvelle version semble avoir considérablement assoupli les restrictions concernant la création d’images de célébrités. Le fil de discussion montre de nombreux exemples d’images générées représentant principalement Donald Trump dans diverses situations, certaines humoristiques ou satiriques.
Les utilisateurs rapportent que cette mise à jour, apparemment disponible via ChatGPT-4o (la version la plus récente du modèle), permet de générer des images de personnalités publiques avec une qualité impressionnante. Cependant, certaines limitations persistent :
Cette évolution marque un changement significatif dans la politique d’OpenAI, qui avait jusqu’à présent maintenu des restrictions strictes sur la génération d’images de personnes réelles, particulièrement les personnalités publiques, pour éviter les risques de désinformation et d’utilisation abusive.
Cette évolution de la génération d’images représente un tournant prévisible dans l’équilibre délicat entre innovation technologique et encadrement éthique. OpenAI, comme d’autres entreprises du secteur, navigue constamment entre deux impératifs contradictoires : offrir des outils puissants et créatifs à ses utilisateurs tout en prévenant les abus potentiels.
L’assouplissement des restrictions sur les célébrités était probablement inévitable face à la pression concurrentielle. D’autres modèles moins restrictifs comme Midjourney ou les solutions open source gagnent en popularité, poussant OpenAI à reconsidérer sa position pour rester pertinent sur le marché.
Cette décision reflète aussi une réalité pragmatique : les barrières techniques sont rarement permanentes. Si les utilisateurs veulent vraiment générer ce type de contenu, ils trouveront des moyens de contourner les restrictions ou se tourneront vers d’autres outils. OpenAI semble avoir choisi d’encadrer cette pratique plutôt que de la voir prospérer ailleurs sans contrôle.
La vraie question n’est pas tant si ces images devraient être permises, mais comment notre société s’adaptera à un monde où la distinction entre images réelles et générées devient de plus en plus floue. Les normes sociales, les cadres juridiques et notre propre littératie médiatique devront évoluer en conséquence.
Imaginez que vous êtes propriétaire d’un petit café dans le Vieux-Québec. Depuis des années, vous avez une politique stricte : pas de photos des clients sans leur permission explicite. C’est votre façon de respecter leur vie privée.
Un jour, votre neveu, passionné d’art, vous propose d’installer une machine fascinante dans votre établissement. Cette machine peut créer des portraits-robots hyperréalistes de n’importe qui à partir d’une simple description. “Imagine un homme comme Justin Trudeau mais avec une barbe et des lunettes”, et voilà, la machine dessine quelqu’un qui ressemble étrangement au Premier ministre, sans être exactement lui.
Au début, vous refusez catégoriquement. “C’est contre nos principes!”, dites-vous. Mais vous remarquez que le café concurrent a installé une machine similaire, et vos clients commencent à y aller pour s’amuser à créer des portraits.
Après réflexion, vous décidez d’installer la machine, mais avec des règles : pas de portraits moqueurs ou dégradants, pas d’images de certaines personnalités locales qui ont explicitement demandé à ne pas être représentées, et un petit autocollant discret indiquant “Portrait imaginaire” sur chaque création.
Est-ce parfait? Non. Certains clients utiliseront ces portraits de façon douteuse. D’autres contourneront vos règles. Mais vous avez trouvé un compromis qui vous permet de rester dans la course tout en maintenant un certain cadre éthique.
C’est exactement le dilemme d’OpenAI avec sa génération d’images de célébrités.
Cette évolution représente une avancée formidable pour la démocratisation de la créativité! Imaginez les possibilités pour les créateurs de contenu québécois qui n’ont pas les moyens de faire appel à des célébrités pour leurs projets. Un humoriste montréalais pourrait créer des sketchs visuels impliquant des personnalités politiques, un enseignant pourrait générer des images éducatives mettant en scène des figures historiques, ou un petit studio pourrait concevoir des concepts de films avec des distributions de rêve.
Cette technologie va libérer l’expression artistique et satirique, pilier fondamental de notre démocratie. La satire politique, tradition bien ancrée au Québec depuis les Bye Bye et les caricatures de Serge Chapleau, trouve ici un nouveau médium d’expression accessible à tous.
De plus, cette évolution forcera notre société à développer une meilleure littératie numérique. Nous apprendrons collectivement à distinguer le vrai du faux, compétence essentielle à l’ère numérique. Les outils de vérification se perfectionneront, et des normes émergeront pour identifier clairement les images générées par IA.
Cette technologie pourrait même avoir des applications bénéfiques insoupçonnées : reconstitution d’événements historiques, visualisation de scénarios hypothétiques pour la planification urbaine ou la gestion de crise, ou création d’avatars personnalisés pour les personnes souffrant de troubles de l’image corporelle.
L’histoire nous montre que chaque nouvelle technologie de communication, de l’imprimerie à la photographie en passant par internet, a d’abord suscité des craintes avant de devenir un outil indispensable d’émancipation et de progrès. La génération d’images de célébrités ne fera pas exception!
Cette évolution marque un tournant dangereux dans notre rapport à la vérité et à l’image publique. OpenAI vient d’ouvrir une boîte de Pandore qu’il sera impossible de refermer, et les conséquences risquent d’être particulièrement graves dans un contexte électoral comme celui que nous vivons actuellement au Québec et au Canada.
Imaginez l’impact de fausses images montrant un candidat dans des situations compromettantes, diffusées massivement sur les réseaux sociaux quelques jours avant un scrutin. Le temps que le démenti circule, le mal sera fait. Notre démocratie, déjà fragilisée par la désinformation, pourrait en subir des dommages irréparables.
Pour les célébrités et personnalités publiques, c’est un cauchemar qui commence. Leur image, leur principal actif professionnel, échappe désormais à leur contrôle. Les implications juridiques sont immenses : qui est responsable lorsqu’une image générée par IA porte atteinte à la réputation d’une personne? L’utilisateur? OpenAI? La plateforme qui l’a diffusée?
Cette technologie risque également d’exacerber les problèmes de harcèlement en ligne, particulièrement envers les femmes et les minorités visibles, qui sont déjà les cibles privilégiées de ce type d’abus. La génération d’images falsifiées à caractère sexuel ou dégradant va devenir encore plus accessible.
Plus inquiétant encore, cette évolution s’inscrit dans une tendance où les entreprises technologiques assouplissent progressivement leurs garde-fous éthiques sous la pression de la concurrence et du profit. Aujourd’hui les célébrités, demain quoi? Des images de violence? Des contenus encore plus problématiques?
Dans un monde où l’on ne pourra plus faire confiance à ce que l’on voit, c’est le fondement même de notre perception de la réalité qui est menacé. Et contrairement aux optimistes, je doute que notre société développe assez rapidement les anticorps nécessaires pour faire face à cette menace.
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