Patrick Bélanger
Article en référence: https://v.redd.it/ns8owi4et2qe1
Boston Dynamics a récemment dévoilé une nouvelle capacité de son robot humanoïde Atlas : la manipulation professionnelle de caméras. Dans une collaboration avec WPP, Nvidia et Canon, Atlas démontre sa capacité à porter des équipements de tournage pesant jusqu’à 20 kg (44 livres). Cette innovation ouvre de nouvelles possibilités pour l’industrie cinématographique et médiatique.
La vidéo promotionnelle montre Atlas effectuant diverses tâches de cameraman, notamment des prises de vue en mouvement, des plans stables et même des acrobaties comme un salto arrière au ralenti tout en tenant l’équipement. Le robot utilise des technologies de stabilisation similaires aux gimbals (stabilisateurs) déjà utilisés dans l’industrie, mais intégrées à un corps mobile capable de se déplacer sur différents terrains.
Cette démonstration s’inscrit dans l’évolution des robots humanoïdes vers des applications commerciales concrètes. Contrairement aux bras robotiques fixes déjà utilisés pour certaines prises de vue, Atlas offre une mobilité complète, permettant des angles de caméra et des mouvements difficiles ou dangereux pour les opérateurs humains.
Il est important de noter que cette technologie arrive à un moment où l’intelligence artificielle générative, comme Sora d’OpenAI, progresse rapidement dans la création de vidéos entièrement synthétiques, soulevant des questions sur la complémentarité ou la concurrence entre ces différentes approches technologiques dans l’industrie audiovisuelle.
L’arrivée d’Atlas comme cameraman robotique représente une évolution logique plutôt qu’une révolution. L’industrie du cinéma utilise déjà des technologies automatisées comme les drones, les caméras sur rails programmables et les stabilisateurs. Atlas combine simplement ces fonctionnalités dans un format plus polyvalent.
Cette innovation s’inscrit dans un continuum technologique où l’automatisation progresse par étapes. Les robots ne remplaceront probablement pas tous les cameramen humains du jour au lendemain, mais occuperont d’abord des niches spécifiques : prises de vue dangereuses, tournages prolongés, ou environnements hostiles. La créativité et le jugement artistique des opérateurs humains resteront valorisés, du moins à moyen terme.
Le véritable enjeu se situe dans l’équilibre économique. Un robot comme Atlas représente un investissement initial important, mais pourrait s’avérer rentable pour les grands studios face aux coûts salariaux, particulièrement dans un contexte où les syndicats d’Hollywood négocient activement les conditions de travail. Le modèle de location d’équipement, déjà courant dans l’industrie, pourrait faciliter l’adoption de ces robots sans nécessiter l’achat direct.
La question n’est pas tant de savoir si cette technologie va s’implanter, mais plutôt comment l’industrie va négocier cette transition. Les compétences humaines évolueront probablement vers la supervision de ces systèmes robotiques et la prise de décisions créatives, tandis que l’exécution technique pourrait être progressivement automatisée.
Imaginez que vous êtes réalisateur d’un film d’action québécois tourné aux chutes Montmorency. Votre scène cruciale exige un plan-séquence vertigineux suivant votre héroïne qui descend en rappel le long de la chute d’eau.
Option 1 (Avant) : Vous engagez Pierre, cameraman expérimenté mais humain. “Eille, j’peux pas descendre la chute avec 15 kilos de caméra sur l’épaule! J’suis bon, mais pas suicidaire!” vous dit-il. Vous finissez par utiliser un drone, mais le vent et les embruns rendent le contrôle difficile. Après 17 tentatives et une journée complète de tournage (avec heures supplémentaires), vous obtenez un plan acceptable, mais pas parfait.
Option 2 (Maintenant) : Vous louez “Atlas-Cam” pour la journée. “Programmation du parcours terminée,” annonce votre technicien. Le robot descend la chute, caméra parfaitement stabilisée, résistant aux embruns, exécutant exactement les mouvements programmés. En trois prises, vous avez votre plan parfait. Pierre, loin d’être au chômage, supervise maintenant l’opération depuis un écran, ajustant les paramètres en temps réel et apportant son expertise créative sans risquer sa vie.
“C’est comme avoir un cascadeur et un cameraman d’élite dans une seule boîte de métal,” plaisante votre producteur. “Pis y’demande même pas de pause café ou de temps double le dimanche!”
Le soir au visionnage, votre directrice photo s’exclame : “On dirait qu’on a eu le budget d’Hollywood! Qui aurait cru qu’un robot pourrait comprendre aussi bien la chorégraphie visuelle?”
Cette innovation représente une véritable démocratisation de la qualité cinématographique! Imaginez des productions québécoises accédant à des prises de vue dignes des plus grands studios hollywoodiens, sans les budgets astronomiques. Nos créateurs pourront enfin concrétiser leur vision artistique sans compromis techniques.
Atlas va révolutionner la production audiovisuelle en permettant des angles impossibles et des mouvements d’une précision inégalée. Les documentaristes pourront capturer la nature sauvage de notre territoire sans perturber les écosystèmes. Les équipes de tournage pourront se concentrer sur l’aspect créatif plutôt que logistique.
Cette technologie créera de nouveaux métiers passionnants : programmeurs de chorégraphies visuelles, superviseurs de robots cameramen, concepteurs de séquences automatisées. Loin de remplacer les humains, elle élèvera leur travail vers des aspects plus créatifs et stratégiques.
Les économies réalisées sur les aspects techniques permettront d’investir davantage dans les scénarios, les acteurs et les effets spéciaux. Notre industrie culturelle pourra ainsi rayonner internationalement avec des productions visuellement spectaculaires, tout en conservant notre identité narrative unique.
Et ce n’est que le début! Imaginez des robots capables d’anticiper les mouvements des acteurs, de suggérer des angles innovants basés sur l’analyse de milliers de chefs-d’œuvre cinématographiques, ou de s’adapter instantanément aux conditions météorologiques. Le futur du cinéma québécois n’a jamais été aussi prometteur!
Voilà une nouvelle menace pour l’emploi dans notre industrie culturelle déjà fragilisée. Les cameramen, ces artisans essentiels du cinéma québécois qui ont développé leur expertise pendant des années, risquent de voir leurs compétences dévalorisées au profit de machines.
Cette technologie arrive au pire moment, alors que notre cinéma national lutte pour sa survie face aux géants du streaming. Les grands studios américains pourront s’offrir ces robots coûteux, creusant davantage l’écart avec nos productions locales à budget limité.
Ne nous leurrons pas : l’argument de la “complémentarité” n’est qu’une étape transitoire. À terme, pourquoi un producteur paierait-il un cameraman syndiqué avec ses avantages sociaux quand un robot peut travailler 24h/24 sans pause? La déshumanisation de l’art cinématographique est en marche.
Plus inquiétant encore, cette innovation s’inscrit dans une tendance plus large d’automatisation qui menace l’ensemble des métiers créatifs. Aujourd’hui le cameraman, demain le monteur, puis le réalisateur lui-même face à l’IA générative. Que restera-t-il de l’âme du cinéma québécois quand nos histoires seront filmées, montées et peut-être même écrites par des machines?
Et n’oublions pas l’aspect énergétique : ces robots sophistiqués nécessitent des ressources considérables pour leur fabrication et leur fonctionnement, ajoutant une pression supplémentaire sur notre environnement déjà fragilisé. Tout ça pour quoi? Des plans plus fluides dans des blockbusters sans âme?
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