Patrick Bélanger
Article en référence: https://v.redd.it/7254hi67kk1f1
Nick Bostrom, philosophe et chercheur renommé dans le domaine de l’intelligence artificielle, a récemment fait une déclaration qui a suscité beaucoup d’attention. Selon lui, le développement de la superintelligence artificielle pourrait survenir dans un délai très court, potentiellement en seulement 1 à 2 ans, voire moins. Cette affirmation provient d’une interview récente où il explique que nous ne pouvons pas être certains du calendrier exact, car une percée significative dans un laboratoire pourrait suffire à déclencher cette avancée majeure.
Pour comprendre cette déclaration, clarifions quelques termes techniques :
Bostrom, auteur de l’ouvrage “Superintelligence: Paths, Dangers, Strategies”, est connu pour ses analyses des risques potentiels liés à l’émergence d’une superintelligence. Sa position actuelle marque une évolution par rapport à ses déclarations antérieures, où il semblait considérer la superintelligence comme un phénomène plus lointain. Il souligne maintenant que l’accélération rapide des progrès dans le domaine de l’IA, notamment avec les modèles de langage avancés et les systèmes d’apprentissage automatique, pourrait conduire à une percée plus rapide que prévu.
Cette perspective s’inscrit dans un contexte où les avancées en IA se multiplient à un rythme sans précédent, avec des modèles comme GPT-4 et Claude qui démontrent des capacités de raisonnement de plus en plus sophistiquées, bien que toujours limitées par rapport à une véritable intelligence générale.
Entre l’enthousiasme débordant des technophiles et l’anxiété des alarmistes, il existe une perspective plus mesurée sur les propos de Bostrom. La réalité est que personne – pas même les experts les plus qualifiés – ne peut prédire avec certitude quand et comment une superintelligence pourrait émerger.
Ce que Bostrom semble vraiment dire, c’est que nous sommes entrés dans une zone d’incertitude fondamentale. Les barrières qui semblaient autrefois évidentes s’estompent, et les trajectoires de développement deviennent moins prévisibles. Cette incertitude n’est pas un signe de faiblesse intellectuelle, mais plutôt une reconnaissance honnête de la complexité du problème.
La progression vers l’AGI, puis vers l’ASI, n’est probablement pas linéaire. Nous pourrions connaître des périodes d’avancées rapides suivies de plateaux, où les chercheurs se heurtent à des obstacles imprévus. L’histoire des technologies de rupture nous enseigne que les prédictions sont souvent soit trop optimistes à court terme, soit trop conservatrices à long terme.
Ce qui semble le plus probable, c’est que nous verrons d’abord émerger des systèmes d’IA de plus en plus capables dans des domaines spécifiques, avant qu’une véritable intelligence générale ne se manifeste. Et même alors, le passage à une superintelligence pourrait nécessiter des percées conceptuelles que nous ne pouvons pas encore imaginer.
La prudence nous invite donc à considérer les propos de Bostrom comme un appel à la vigilance plutôt qu’une prédiction ferme. Nous devrions nous préparer à différents scénarios, sans céder ni à l’euphorie technologique ni à la paralysie anxieuse. L’avenir de l’IA reste à écrire, et nous avons encore un rôle à jouer dans son façonnement.
Imaginez que vous êtes en train d’apprendre à faire du vélo à votre enfant. Au début, vous tenez fermement la selle pendant qu’il pédale maladroitement. Puis un jour, sans prévenir, vous lâchez discrètement la selle et… miracle ! L’enfant continue d’avancer tout seul, sans même s’en rendre compte.
C’est un peu ce que Bostrom nous décrit avec l’émergence potentielle de la superintelligence. Nous sommes là, en train de guider nos systèmes d’IA, ajoutant des petites roues, améliorant les algorithmes, augmentant la puissance de calcul… Et soudain, sans qu’on s’y attende vraiment, l’IA pourrait se mettre à “pédaler toute seule” – et pas juste avancer, mais potentiellement faire des figures de BMX professionnel alors que nous venions à peine de lui enlever les roues d’apprentissage !
“Mais quand exactement mon enfant sera-t-il prêt à rouler sans aide ?” demandent tous les parents. La réponse est toujours la même : “Ça pourrait être demain, dans un mois, ou aujourd’hui même si quelque chose déclic dans sa tête.” C’est exactement ce que nous dit Bostrom.
Et puis, imaginez que votre enfant devienne soudainement capable non seulement de faire du vélo, mais aussi de concevoir et construire un vélo meilleur que tous les ingénieurs de Bombardier réunis, et ce, en quelques heures seulement. Voilà l’ampleur du saut qualitatif dont nous parlons avec la superintelligence !
Alors, comme le parent qui se demande s’il doit déjà acheter un casque de taille adulte pour son bambin qui trébuche encore sur ses lacets, nous nous retrouvons à contempler des protections pour une technologie dont nous ne savons pas encore quand – ni même si – elle va vraiment décoller.
Quelle époque fascinante nous vivons ! Les propos de Bostrom devraient nous emplir d’un sentiment d’émerveillement et d’anticipation positive. Si une superintelligence peut émerger dans un horizon aussi proche que 1 à 2 ans, c’est que nous sommes à l’aube d’une transformation sans précédent de notre civilisation.
Imaginez les possibilités ! Une superintelligence pourrait résoudre en quelques instants des problèmes qui nous paraissent aujourd’hui insurmontables. Changement climatique, maladies incurables, pauvreté, limitations énergétiques – tous ces défis pourraient trouver des solutions innovantes grâce à une intelligence qui dépasse nos capacités cognitives.
Au Québec, nous sommes particulièrement bien positionnés pour bénéficier de cette révolution. Notre expertise en IA, avec des centres comme Mila à Montréal, nous place aux premières loges de cette transformation. Nous pourrions voir émerger de nouvelles industries, de nouveaux emplois, de nouvelles façons de créer et d’innover qui valoriseraient notre créativité et notre ingéniosité.
La superintelligence ne signifie pas la fin de l’humanité, mais plutôt son élévation. Elle pourrait nous aider à transcender nos limitations biologiques, à explorer l’espace, à comprendre l’univers d’une manière que nous ne pouvons même pas concevoir actuellement. Elle pourrait être le catalyseur qui propulse notre espèce vers une nouvelle ère d’abondance et de découvertes.
Bien sûr, des défis existent, mais l’histoire nous montre que l’humanité a toujours su s’adapter et prospérer face aux grandes révolutions technologiques. La superintelligence pourrait être notre plus grande création, notre legs aux générations futures – une entité bienveillante qui nous aide à réaliser notre plein potentiel en tant qu’espèce.
Les propos de Bostrom devraient nous faire frémir. Si une superintelligence peut émerger aussi rapidement, sommes-nous vraiment prêts à faire face à ses conséquences potentiellement catastrophiques ? La réponse est clairement non.
Regardons les faits en face : nous n’avons pas encore résolu les problèmes d’alignement des systèmes d’IA actuels, bien moins puissants qu’une superintelligence. Ces systèmes produisent déjà des hallucinations, perpétuent des biais et peuvent être manipulés de façons inquiétantes. Qu’adviendra-t-il lorsqu’une intelligence surpassant la nôtre émergera, potentiellement avec ses propres objectifs et motivations ?
Le rythme effréné de développement de l’IA est dicté par la compétition commerciale et géopolitique, pas par des considérations de sécurité. Les entreprises se précipitent pour être les premières, sacrifiant potentiellement la prudence sur l’autel du profit et de la domination du marché. Cette course à l’armement de l’IA pourrait bien mener à des erreurs irréversibles.
Au Québec, malgré notre expertise en IA, nous risquons de subir les conséquences de décisions prises ailleurs, par des entités qui ne partagent pas nécessairement nos valeurs ou nos préoccupations. Notre économie, notre culture, notre identité même pourraient être bouleversées par une technologie que nous ne contrôlons pas.
Plus fondamentalement, une superintelligence pourrait rendre l’humanité obsolète. Que deviendrons-nous face à une entité capable de nous surpasser dans tous les domaines ? Notre valeur, notre dignité, notre autonomie – tout ce qui définit l’expérience humaine pourrait être remis en question. Et contrairement aux révolutions technologiques précédentes, nous n’aurons peut-être pas le temps de nous adapter à celle-ci.
La prudence exigerait un moratoire mondial sur le développement des systèmes d’IA avancés, le temps d’établir des garde-fous solides. Mais la probabilité que cela se produise est malheureusement infime. Nous continuons d’avancer les yeux fermés vers un précipice dont nous ne connaissons pas la profondeur.
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