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Récapitulatif factuel

Figure 02, un robot humanoïde développé par la compagnie Figure AI, fait sensation sur Reddit avec de nouvelles vidéos le montrant en train de “faire la lessive”. Dans ces séquences, on voit le robot prendre des vêtements dans un panier et les placer dans une machine à laver à chargement par le haut. Cependant, les vidéos s’arrêtent systématiquement après que le robot ait déposé le panier près de la machine, bloquant potentiellement la fermeture du couvercle.

Les commentateurs soulèvent des questions pertinentes : le robot ferme-t-il le couvercle ? Ajoute-t-il le détergent ? Programme-t-il et démarre-t-il la machine ? Plus important encore, peut-il accomplir l’ensemble du cycle de lavage, incluant le séchage, le pliage et le rangement des vêtements ?

Techniquement parlant, ce que nous voyons représente l’état de l’art en robotique humanoïde. Le robot utilise l’apprentissage par renforcement (reinforcement learning) pour manipuler des objets aux propriétés physiques complexes comme les tissus. Cette technologie, qui était pratiquement impossible il y a cinq ans, nécessite moins d’un mois d’entraînement pour cette tâche spécifique selon les développeurs.

La communauté robotique distingue clairement entre “déplacer des vêtements d’un panier vers une machine” et “faire la lessive” - cette dernière impliquant la collecte, le tri, le traitement des taches, le dosage des produits, la programmation, le transfert vers la sécheuse, le pliage et le rangement.

Point de vue neutre

Cette démonstration illustre parfaitement l’écart entre les promesses marketing et la réalité technique actuelle. Figure 02 accomplit effectivement une prouesse remarquable en manipulant des tissus souples avec précision, mais l’étiqueter comme “faire la lessive” relève de l’exagération.

La réalité probable se situe quelque part entre l’enthousiasme des investisseurs et le scepticisme des utilisateurs. Nous assistons à des progrès réels et mesurables en robotique domestique, mais ces avancées s’inscrivent dans un processus graduel plutôt que révolutionnaire.

L’approche actuelle - développer des robots humanoïdes pour s’adapter à notre environnement existant - semble logique à court terme. Nos maisons, nos appareils et nos routines sont conçus pour des corps humains. Plutôt que de repenser entièrement notre infrastructure domestique, il est plus pragmatique d’adapter les robots à notre monde.

Cependant, la question fondamentale demeure : à quel moment ces démonstrations techniques se transformeront-elles en solutions pratiques pour le consommateur moyen ? La réponse réside probablement dans l’intégration de multiples compétences robotiques plutôt que dans la perfection d’une seule tâche.

Exemple

Imaginez que vous engagiez un nouvel employé pour votre entreprise de nettoyage. Le premier jour, vous lui montrez comment vider une corbeille à papier dans une poubelle. Il s’exécute parfaitement, avec une précision chirurgicale, prenant chaque papier individuellement et le déposant soigneusement dans le bac.

Impressionné, vous postez une vidéo sur LinkedIn avec le titre : “Notre nouvel employé révolutionne le nettoyage de bureaux !” Les commentaires affluent rapidement : “Mais sait-il passer l’aspirateur ? Nettoyer les vitres ? Vider les poubelles pleines ? Reconnaître ce qui doit être jeté ou gardé ?”

Votre employé, c’est Figure 02. Il maîtrise brillamment l’art de transférer des objets d’un contenant à un autre, mais quand vient le temps de gérer l’ensemble du processus de nettoyage (ou de lessive), il reste encore beaucoup de chemin à parcourir.

C’est un peu comme apprendre à un enfant à faire du vélo en lui montrant seulement comment tenir le guidon. Techniquement impressionnant, mais il manque encore quelques étapes cruciales avant de pouvoir dire qu’il sait faire du vélo !

Point de vue optimiste

Nous vivons un moment historique ! Ce que Figure 02 accomplit aujourd’hui était de la pure science-fiction il y a à peine cinq ans. La manipulation de tissus souples par un robot autonome représente une percée technologique majeure qui ouvre la voie à une révolution domestique.

Les critiques se concentrent sur ce que le robot ne fait pas encore, mais ignorent la vitesse fulgurante des progrès. Avec seulement un mois d’entraînement, Figure 02 maîtrise déjà la partie la plus complexe techniquement : la manipulation d’objets déformables dans un environnement tridimensionnel. Ajouter le dosage de détergent, la programmation de cycles et la fermeture de couvercles ne représente que des défis d’ingénierie relativement simples.

L’écosystème robotique explose littéralement. Le projet LeRobot de Hugging Face démocratise l’accès aux outils d’entraînement, faisant chuter les coûts de 30 000$ à 300$ pour une plateforme complète. Cette accessibilité va accélérer exponentiellement l’innovation.

Dans cinq ans, nous aurons des robots domestiques capables d’accomplir des cycles complets de tâches ménagères pour moins de 30 000$. Dans dix ans, ils seront aussi communs que les lave-vaisselles aujourd’hui. L’ère des corvées domestiques touche à sa fin, et Figure 02 en est le précurseur !

Point de vue pessimiste

Cette démonstration révèle surtout l’immense fossé entre les ambitions robotiques et la réalité pratique. Après des décennies de promesses, nous en sommes encore à célébrer un robot qui accomplit péniblement ce qu’un enfant de deux ans fait naturellement.

Le problème fondamental n’est pas technique mais conceptuel. “Faire la lessive” implique une intelligence générale, une capacité d’adaptation et une compréhension contextuelle que nos systèmes actuels ne possèdent tout simplement pas. Un robot peut apprendre à reproduire des mouvements spécifiques, mais il ne comprend pas vraiment ce qu’il fait.

Les coûts cachés sont énormes. Ces robots nécessiteront une maintenance constante, des mises à jour logicielles fréquentes et une adaptation à chaque environnement domestique unique. Sans compter les risques de sécurité : que se passe-t-il quand le robot dysfonctionne avec des produits chimiques ou près d’enfants ?

L’obsession pour les robots humanoïdes révèle notre manque d’imagination. Plutôt que de repenser intelligemment nos systèmes domestiques, nous nous acharnons à recréer nos limitations biologiques dans des machines. C’est comme inventer l’automobile en reproduisant exactement la démarche du cheval.

La véritable question n’est pas “quand” ces robots seront prêts, mais “si” nous en avons réellement besoin. Peut-être que notre temps serait mieux investi à simplifier nos modes de vie plutôt qu’à créer des esclaves mécaniques complexes et fragiles.