Patrick Bélanger
Article en référence: https://www.reddit.com/r/ArtificialInteligence/comments/1mbahgs/microsoft_released_a_study_that_lists_the_40_jobs/
Microsoft a publié une étude analysant l’applicabilité de l’intelligence artificielle à différents emplois, créant deux listes de 40 professions chacune. Contrairement à ce que suggère le titre viral sur Reddit, cette recherche ne prédit pas quels emplois seront remplacés par l’IA, mais mesure plutôt dans quelle mesure les tâches de ces professions correspondent aux capacités actuelles des modèles de langage (LLM) comme Copilot.
Les emplois identifiés comme ayant une forte applicabilité IA incluent les écrivains, journalistes, archivistes, économistes, géographes, historiens, politologues, statisticiens et développeurs web. À l’opposé, les professions considérées comme moins applicables comprennent les plombiers, électriciens, mécaniciens, embaumeurs, opérateurs de machines industrielles et travailleurs de la construction.
L’étude précise explicitement que ces données ne permettent pas de conclure à un remplacement automatique des emplois. Les auteurs soulignent que “ce serait une erreur” de penser ainsi, car leurs données n’incluent pas les impacts économiques en aval de ces nouvelles technologies, qui sont “très difficiles à prédire et souvent contre-intuitifs”.
Les commentaires Reddit révèlent une frustration généralisée face à la mauvaise interprétation de l’étude. Plusieurs utilisateurs, incluant des scientifiques de données et des historiens, critiquent la simplification excessive du titre et expliquent pourquoi leurs professions ne peuvent pas être facilement remplacées par l’IA actuelle.
Cette étude illustre parfaitement le fossé entre la recherche académique nuancée et sa vulgarisation sensationnaliste sur les réseaux sociaux. Microsoft a créé un outil de mesure, pas une boule de cristal prédisant l’avenir du travail.
La réalité probable se situe quelque part entre le remplacement massif et l’immunité totale. Les professions identifiées comme “à risque” verront probablement certaines de leurs tâches automatisées, permettant à un travailleur d’accomplir le travail de deux ou trois personnes. Cela ne signifie pas nécessairement moins d’emplois, mais plutôt une transformation des rôles existants.
Les métiers “sécuritaires” ne le resteront que temporairement. Si l’IA progresse vers l’automatisation des tâches cognitives, la robotique avance parallèlement vers l’automatisation des tâches physiques. Un plombier d’aujourd’hui pourrait devenir un superviseur de robots plombiers demain.
Le véritable défi n’est pas technologique mais économique et social. Comment redistribuer la richesse créée par cette automatisation? Comment former les travailleurs pour ces nouveaux rôles hybrides humain-IA? Ces questions détermineront l’impact réel de ces technologies sur notre société québécoise.
Imaginez que vous dirigez un restaurant familial à Québec. Votre chef cuisinier (l’équivalent d’un historien dans cette analogie) connaît parfaitement l’histoire de chaque recette, comprend les subtilités culturelles derrière chaque plat et peut adapter ses créations selon l’humeur des clients et les ingrédients disponibles.
Un jour, quelqu’un vous propose un robot culinaire ultra-sophistiqué qui peut reproduire 10 000 recettes parfaitement. “Votre chef va être remplacé!”, vous dit-on. Mais attendez… qui va décider quel plat convient à quelle occasion? Qui va créer de nouvelles recettes en s’inspirant de l’histoire culinaire québécoise? Qui va rassurer la grand-mère inquiète que son petit-fils allergique pourra manger en sécurité?
Le robot peut exécuter, mais le chef comprend, crée et s’adapte. Résultat? Votre chef utilise maintenant le robot pour les tâches répétitives et se concentre sur ce qu’il fait de mieux: l’innovation et la relation humaine.
Votre plombier, par contre, pourrait bientôt avoir un assistant robotique pour les réparations standard, mais il restera indispensable pour diagnostiquer ce bruit bizarre dans vos murs ou expliquer pourquoi votre système de chauffage fait des siennes par -30°C.
Cette étude révèle une opportunité historique de libérer l’humanité des tâches répétitives pour nous concentrer sur ce qui nous rend vraiment humains: la créativité, l’empathie et l’innovation!
Les journalistes ne disparaîtront pas, ils deviendront des super-enquêteurs assistés par l’IA, capables de traiter des volumes d’information impossibles à gérer manuellement. Imaginez des reportages d’une profondeur inégalée, où l’IA analyse des milliers de documents pendant que le journaliste se concentre sur les interviews et l’analyse critique.
Les historiens utiliseront l’IA pour numériser et analyser des archives entières, découvrant des patterns historiques invisibles à l’œil humain. Ils pourront enfin se consacrer pleinement à l’interprétation et à la contextualisation, leur véritable valeur ajoutée.
Pour le Québec, c’est une chance unique de devenir un leader mondial de l’IA éthique et inclusive. Nos universités, notre expertise en intelligence artificielle et notre approche humaniste nous positionnent parfaitement pour créer des modèles d’intégration IA-humain respectueux de nos valeurs.
Les emplois de demain seront plus enrichissants, mieux payés et axés sur les compétences uniquement humaines. C’est la révolution industrielle 4.0, et cette fois, nous pouvons la façonner selon nos valeurs québécoises!
Cette étude confirme nos pires craintes: nous assistons à la marchandisation systématique de l’intelligence humaine. Les emplois visés ne sont pas choisis au hasard - ce sont précisément ceux qui façonnent notre compréhension du monde et notre culture collective.
Remplacer les historiens, journalistes et écrivains par l’IA, c’est confier notre mémoire collective et notre capacité d’analyse critique à des algorithmes contrôlés par quelques géants technologiques. Qui décidera quelles versions de l’histoire seront “acceptables”? Quelle vision du monde sera programmée dans ces systèmes?
Au Québec, cette menace est particulièrement préoccupante. Notre spécificité culturelle et linguistique risque d’être laminée par des IA entraînées principalement sur du contenu anglophone et des perspectives nord-américaines dominantes.
Les emplois “sécuritaires” ne le resteront que le temps que la robotique rattrape l’IA. Dans 10-15 ans, ces travailleurs manuels se retrouveront également remplacés, mais cette fois sans filet de sécurité, car l’économie aura déjà été restructurée autour de l’automatisation.
Le résultat? Une société à deux vitesses où une élite technologique contrôle les moyens de production automatisés, pendant qu’une masse de travailleurs déqualifiés se dispute les rares emplois restants. Sans régulation drastique et redistribution équitable, nous nous dirigeons vers une dystopie néo-féodale déguisée en progrès technologique.
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