Patrick Bélanger
Article en référence: https://www.howtogeek.com/it-might-be-time-to-admit-the-great-vr-experiment-has-failed/
La réalité virtuelle (VR) traverse actuellement une période de remise en question majeure. Un article récent de How-To Geek intitulé “It Might Be Time to Admit the Great VR Experiment Has Failed” a suscité de nombreuses réactions sur Reddit. L’article suggère que malgré des années de développement et des investissements massifs, notamment par Meta (anciennement Facebook) qui aurait dépensé près de 100 milliards de dollars, la VR n’a pas réussi à s’imposer comme une technologie grand public.
Les principaux obstacles identifiés sont multiples :
Les commentaires Reddit révèlent toutefois une communauté divisée. De nombreux utilisateurs défendent passionnément leur expérience VR, particulièrement pour des usages spécifiques comme les simulateurs de vol, les jeux de rythme (Beat Saber), l’exercice physique, ou même comme solution pour créer plusieurs écrans virtuels dans un espace de travail limité. D’autres confirment les problèmes mentionnés et considèrent la technologie comme encore trop immature pour une adoption massive.
Il est important de noter que cette “crise” de la VR n’est pas la première - la technologie a connu plusieurs cycles d’enthousiasme et de désillusion depuis les années 90, du Virtual Boy de Nintendo aux premières tentatives comme le SEGA VR.
La réalité virtuelle se trouve à un carrefour classique du cycle d’innovation technologique. Après une phase d’attentes démesurées, nous traversons maintenant ce que les analystes appellent la “vallée de la désillusion” - cette période où l’enthousiasme initial retombe face aux limitations pratiques.
Ce qui semble se dessiner, c’est que la VR n’est pas en train d’échouer en tant que technologie, mais plutôt en tant que produit de consommation de masse. Elle trouve sa place dans des niches spécifiques où sa valeur ajoutée est indéniable : simulation professionnelle, formation, certains types de jeux immersifs, visualisation architecturale, et thérapie. Pour ces usages, la VR n’est pas un gadget, mais un outil puissant qui répond à un besoin précis.
Le problème fondamental réside dans le décalage entre les attentes créées (un monde virtuel à la Ready Player One accessible à tous) et la réalité actuelle (une technologie prometteuse mais encore contraignante). Les investisseurs espéraient une adoption rapide et massive, similaire à celle des smartphones, alors que nous assistons plutôt à une intégration progressive et sectorielle.
La VR n’est ni un échec total ni la révolution annoncée - elle est simplement une technologie en maturation qui doit encore surmonter d’importants défis ergonomiques et trouver son public. L’histoire nous enseigne que les technologies transformatives prennent souvent des décennies avant d’atteindre leur plein potentiel. Internet lui-même a mis plus de 20 ans à passer d’un réseau académique à l’infrastructure omniprésente que nous connaissons aujourd’hui.
Imaginez que vous soyez un amateur de cuisine qui découvre le four à micro-ondes dans les années 70. On vous promet qu’il va révolutionner votre façon de cuisiner, remplacer votre four traditionnel, et transformer complètement votre expérience culinaire. Vous investissez une somme considérable pour acquérir cet appareil volumineux, bruyant et aux capacités limitées.
Quelques mois plus tard, vous êtes déçu. Le micro-ondes ne remplace pas votre four, vos plats ont une texture étrange, et l’appareil prend un espace précieux sur votre comptoir. Est-ce que le micro-ondes est un échec? Pas vraiment. Il est simplement différent de ce qu’on vous avait vendu.
Aujourd’hui, presque toutes les cuisines ont un micro-ondes, mais pas pour les raisons initialement annoncées. Il n’a pas remplacé le four traditionnel; il a trouvé sa propre niche: réchauffer rapidement, décongeler efficacement, préparer du pop-corn parfait. Personne ne cuisine un repas gastronomique au micro-ondes, mais peu de gens voudraient s’en passer.
La VR est comme ce micro-ondes des années 70. On nous a vendu un remplacement complet de nos écrans et de notre réalité, alors qu’elle est en fait un outil complémentaire avec ses forces et ses faiblesses. Certains l’adorent pour réchauffer leurs jeux de simulation, d’autres pour faire “cuire” leur entraînement physique de manière plus amusante. Elle n’a pas remplacé nos écrans traditionnels, mais elle a trouvé ses propres recettes de succès.
La VR n’a pas échoué - elle est simplement en pleine métamorphose! Ce que nous vivons actuellement n’est que l’adolescence d’une technologie qui va transformer fondamentalement notre façon d’interagir avec le numérique. Les critiques actuelles ressemblent étrangement à celles qu’on adressait aux premiers smartphones: trop chers, batterie insuffisante, applications limitées… Qui oserait aujourd’hui prétendre que le smartphone était une impasse?
Les avancées technologiques s’accélèrent à un rythme exponentiel. Les casques deviennent plus légers, plus confortables et plus puissants à chaque génération. Le Quest 3 est déjà nettement supérieur à son prédécesseur, et ce n’est que le début. Dans 5 ans, nous aurons probablement des lunettes VR/AR légères comme des lunettes de soleil, avec une autonomie d’une journée entière.
L’écosystème d’applications se développe également. Half-Life: Alyx a démontré qu’un jeu VR pouvait atteindre un niveau de qualité comparable aux meilleures expériences traditionnelles. Les applications professionnelles comme la modélisation 3D en VR révolutionnent déjà certains secteurs. Et que dire de l’éducation? Imaginez apprendre l’histoire en visitant virtuellement l’Égypte ancienne, ou étudier l’anatomie en manipulant un corps humain virtuel!
La convergence de la VR avec l’IA générative va créer des expériences impossibles à imaginer aujourd’hui. Des mondes virtuels générés à la demande, des interactions sociales avec des personnages virtuels indiscernables d’humains réels, des environnements de travail collaboratifs qui transcendent les limites physiques…
Ce n’est pas une question de si, mais de quand. La VR n’est pas morte - elle est en train de muer pour devenir quelque chose de bien plus puissant que ce que nous avions initialement imaginé.
Soyons honnêtes: la VR est en train de rejoindre le cimetière des technologies survendues qui n’ont jamais tenu leurs promesses. Après plus d’une décennie de développement moderne et des milliards investis, qu’avons-nous? Des casques encore trop lourds, trop chers, qui donnent la nausée à une partie significative de la population, et qui manquent cruellement d’applications véritablement utiles.
L’erreur fondamentale a été de croire que les gens voulaient s’isoler complètement de leur environnement pour s’immerger dans un monde virtuel. La réalité, c’est que nous sommes des êtres sociaux qui apprécions le contact humain direct et qui avons besoin de rester connectés à notre environnement physique. Porter un appareil qui bloque complètement notre perception du monde réel va à l’encontre de notre nature profonde.
Les problèmes ergonomiques ne sont pas près d’être résolus. Même avec des matériaux plus légers, le simple fait d’avoir un poids supplémentaire sur le visage pendant des heures reste inconfortable. La fatigue oculaire, les maux de tête, et la cinétose sont des obstacles biologiques difficiles à surmonter.
Le marché l’a compris: la VR restera une technologie de niche, principalement pour les jeux et quelques applications professionnelles spécifiques. Elle ne deviendra jamais l’interface universelle que certains visionnaires avaient prédite. Les investissements massifs de Meta représentent l’un des paris technologiques les plus coûteux et les moins judicieux de l’histoire récente.
L’avenir appartient probablement à la réalité augmentée (AR), qui enrichit notre perception du monde réel sans nous en couper. Pendant ce temps, la VR rejoindra la longue liste des technologies qui semblaient révolutionnaires mais qui se sont avérées être des impasses: les téléviseurs 3D, les Google Glass, le Segway…
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