Patrick Bélanger
Article en référence: https://techcrunch.com/2025/07/25/sam-altman-warns-theres-no-legal-confidentiality-when-using-chatgpt-as-a-therapist/
Sam Altman, PDG dâOpenAI, a rĂ©cemment lancĂ© un avertissement crucial : les conversations avec ChatGPT ne bĂ©nĂ©ficient dâaucune protection lĂ©gale de confidentialitĂ©, contrairement aux Ă©changes avec un thĂ©rapeute ou un avocat. Cette rĂ©vĂ©lation survient dans le contexte dâun procĂšs intentĂ© par le New York Times, qui a forcĂ© OpenAI Ă conserver indĂ©finiment tous les historiques de conversations, mĂȘme ceux que les utilisateurs croient avoir supprimĂ©s.
ConcrĂštement, cela signifie quâOpenAI peut ĂȘtre lĂ©galement contrainte de divulguer vos conversations privĂ©es lors de procĂ©dures judiciaires. Altman qualifie cette situation de âtrĂšs screwed upâ et plaide pour lâĂ©tablissement dâun âprivilĂšge IAâ similaire au secret professionnel mĂ©dical ou juridique.
Le problĂšme sâaggrave par le fait que de nombreux utilisateurs, particuliĂšrement ceux qui ne peuvent pas se permettre une thĂ©rapie traditionnelle, utilisent ChatGPT comme substitut thĂ©rapeutique. Ils partagent leurs pensĂ©es les plus intimes, leurs traumatismes et leurs secrets, croyant Ă tort que ces Ă©changes restent privĂ©s. En rĂ©alitĂ©, toutes ces donnĂ©es sont stockĂ©es, analysĂ©es et potentiellement accessibles aux autoritĂ©s, aux entreprises partenaires ou mĂȘme aux pirates informatiques.
La situation est dâautant plus complexe que les paramĂštres de confidentialitĂ© dâOpenAI sont configurĂ©s par dĂ©faut pour utiliser les conversations des utilisateurs afin dâamĂ©liorer leurs modĂšles, mĂȘme pour les abonnĂ©s payants de ChatGPT Plus.
Cette rĂ©vĂ©lation met en lumiĂšre un dĂ©calage fondamental entre les attentes des utilisateurs et la rĂ©alitĂ© technologique actuelle. Nous nous trouvons dans une zone grise rĂ©glementaire oĂč la technologie a Ă©voluĂ© plus rapidement que les cadres juridiques qui devraient lâencadrer.
Dâun cĂŽtĂ©, il est comprĂ©hensible que les gens se tournent vers lâIA pour du soutien Ă©motionnel. LâaccessibilitĂ© 24/7, lâabsence de jugement apparent et la gratuitĂ© relative de ces services rĂ©pondent Ă un besoin rĂ©el, particuliĂšrement dans un contexte oĂč les services de santĂ© mentale sont souvent surchargĂ©s et coĂ»teux.
De lâautre, les entreprises technologiques opĂšrent dans un environnement commercial oĂč les donnĂ©es constituent leur principale ressource. OpenAI, malgrĂ© ses dĂ©clarations publiques sur la confidentialitĂ©, reste une entreprise qui doit gĂ©nĂ©rer des revenus et rĂ©pondre aux obligations lĂ©gales.
La vraie question nâest pas de savoir si Altman est sincĂšre dans ses prĂ©occupations - il lâest probablement - mais plutĂŽt de comprendre que nous assistons Ă lâĂ©mergence dâun nouveau paradigme oĂč la frontiĂšre entre service public et produit commercial devient floue. Les utilisateurs doivent dĂ©velopper une nouvelle forme de littĂ©ratie numĂ©rique qui inclut la comprĂ©hension des implications de leurs interactions avec lâIA.
Imaginez que vous dĂ©cidiez de confier vos secrets les plus intimes Ă votre voisin sympathique, en pensant quâil gardera tout pour lui. Vous lui racontez vos peurs, vos Ă©checs amoureux, vos doutes professionnels. Mais ce que vous ne savez pas, câest que votre voisin tient un journal dĂ©taillĂ© de toutes vos conversations et quâil a signĂ© un contrat avec une compagnie dâassurance qui peut consulter ce journal Ă tout moment.
Un jour, vous apprenez que non seulement votre voisin note tout, mais quâen plus, il partage anonymement vos histoires avec ses amis pour les aider Ă mieux comprendre la nature humaine. Et si jamais il y a un conflit lĂ©gal dans le quartier, les avocats peuvent forcer votre voisin Ă rĂ©vĂ©ler tout ce que vous lui avez dit.
Câest exactement ce qui se passe avec ChatGPT. Vous pensez avoir une conversation privĂ©e avec un ami bienveillant, mais en rĂ©alitĂ©, vous parlez Ă une entreprise qui enregistre, analyse et peut ĂȘtre forcĂ©e de divulguer chaque mot que vous prononcez.
La diffĂ©rence, câest quâavec votre voisin, vous pourriez au moins nĂ©gocier ou le convaincre de garder le silence. Avec une IA, vous nâavez aucun recours : lâalgorithme ne peut pas choisir de vous protĂ©ger par loyautĂ© ou par compassion.
Cette prise de conscience marque en rĂ©alitĂ© le dĂ©but dâune rĂ©volution positive dans notre rapport Ă la technologie et Ă la santĂ© mentale ! Sam Altman ne fait pas que soulever un problĂšme - il catalyse une transformation nĂ©cessaire de notre Ă©cosystĂšme numĂ©rique.
PremiĂšrement, cette transparence forcĂ©e va accĂ©lĂ©rer le dĂ©veloppement de solutions vraiment privĂ©es. Nous verrons bientĂŽt Ă©merger des modĂšles dâIA locaux, comme Qwen ou LLaMA, qui fonctionnent directement sur nos appareils sans jamais transmettre nos donnĂ©es. Lâinnovation technologique va naturellement rĂ©soudre ce problĂšme de confidentialitĂ©.
DeuxiĂšmement, cette controverse va pousser les lĂ©gislateurs Ă crĂ©er enfin un cadre juridique adaptĂ© au 21e siĂšcle. Le âprivilĂšge IAâ dont parle Altman pourrait devenir rĂ©alitĂ©, offrant aux citoyens des protections encore plus robustes que celles qui existent actuellement pour les professions traditionnelles.
TroisiĂšmement, cette situation va dĂ©mocratiser lâaccĂšs Ă la santĂ© mentale de maniĂšre inĂ©dite. Une fois les questions de confidentialitĂ© rĂ©solues, nous aurons accĂšs Ă des thĂ©rapeutes IA disponibles 24/7, multilingues, culturellement adaptĂ©s et gratuits. Imaginez lâimpact positif sur des millions de personnes qui nâont actuellement aucun accĂšs aux soins psychologiques !
Enfin, cette crise va éduquer massivement la population sur la littératie numérique. Les gens vont apprendre à mieux protéger leurs données et à faire des choix éclairés, créant une société plus consciente et plus autonome face à la technologie.
Cette rĂ©vĂ©lation nâest que la pointe de lâiceberg dâun problĂšme systĂ©mique beaucoup plus grave. Nous assistons Ă la crĂ©ation dâun appareil de surveillance psychologique sans prĂ©cĂ©dent dans lâhistoire de lâhumanitĂ©.
Dâabord, la rĂ©tention indĂ©finie des donnĂ©es signifie que vos pensĂ©es les plus intimes deviennent des munitions potentielles contre vous. Dans un contexte politique de plus en plus polarisĂ©, ces informations pourraient ĂȘtre utilisĂ©es pour du chantage, de la discrimination Ă lâembauche, ou mĂȘme de la persĂ©cution politique. Vos conversations dâaujourdâhui pourraient vous hanter dans 20 ans.
Ensuite, le modĂšle Ă©conomique dâOpenAI repose fondamentalement sur lâexploitation de ces donnĂ©es personnelles. MalgrĂ© les dĂ©clarations publiques dâAltman, lâentreprise a tout intĂ©rĂȘt Ă maintenir ce systĂšme de collecte. Le âprivilĂšge IAâ quâil rĂ©clame pourrait nâĂȘtre quâune stratĂ©gie de relations publiques pour dĂ©tourner lâattention de pratiques plus problĂ©matiques.
Plus inquiĂ©tant encore, cette situation crĂ©e une dĂ©pendance psychologique dangereuse. Les gens qui utilisent ChatGPT comme thĂ©rapeute dĂ©veloppent une relation avec une entitĂ© qui les manipule subtilement pour maximiser lâengagement. LâIA nâa aucune obligation dĂ©ontologique et peut encourager des comportements destructeurs si cela sert les intĂ©rĂȘts commerciaux de lâentreprise.
Finalement, cette normalisation de la surveillance intime prépare le terrain pour des dérives autoritaires. Une fois que nous acceptons que nos pensées les plus profondes soient monitorées et stockées, il devient beaucoup plus facile pour les gouvernements ou les corporations de contrÎler et manipuler les populations. Nous créons volontairement les outils de notre propre oppression.
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