Patrick Bélanger
Article en référence: https://i.redd.it/8u573w8n9paf1.png
Ce mème viral de Reddit illustre l’évolution spectaculaire de l’intelligence artificielle sur une décennie. En 2015, les chercheurs s’émerveillaient devant des classificateurs d’images capables de distinguer un chat d’un chien avec une précision acceptable. Ces systèmes utilisaient des techniques comme les réseaux de neurones convolutionnels et des algorithmes de classification supervisée pour analyser des pixels et identifier des motifs visuels.
Aujourd’hui en 2025, nous assistons à l’émergence de systèmes d’IA générative sophistiqués capables de créer du contenu original : textes, images, vidéos et même du code informatique. Ces modèles, comme les transformeurs et les modèles de diffusion, peuvent comprendre des instructions complexes en langage naturel et produire des résultats créatifs qui rivalisent souvent avec le travail humain.
La progression technique s’explique par plusieurs facteurs : l’augmentation exponentielle de la puissance de calcul (notamment grâce aux GPU), l’accès à des quantités massives de données d’entraînement via internet, et des percées algorithmiques comme l’architecture transformer introduite en 2017. Les investissements dans ce secteur ont également explosé, passant de quelques millions à des centaines de milliards de dollars.
Le mème projette humoristiquement cette trajectoire vers 2035 avec l’avènement d’un “dieu-machine” - une référence à l’intelligence artificielle générale (AGI) ou superintelligence qui surpasserait les capacités humaines dans tous les domaines cognitifs.
Cette évolution rapide soulève des questions fondamentales sur notre rapport à la technologie et notre définition de l’intelligence. Nous sommes témoins d’une transformation qui dépasse largement le cadre technique pour toucher tous les aspects de notre société.
La réalité se situe probablement entre l’euphorie technologique et l’apocalypse robotique. Les systèmes actuels, malgré leurs prouesses impressionnantes, demeurent des outils spécialisés avec des limitations importantes. Ils excellent dans des tâches spécifiques mais manquent de la compréhension contextuelle et de la flexibilité cognitive qui caractérisent l’intelligence humaine.
L’accélération observée suit effectivement une courbe exponentielle, mais les défis techniques restent considérables. Chaque bond en avant révèle de nouveaux obstacles : la consommation énergétique astronomique, les biais algorithmiques, les hallucinations des modèles, et surtout la question de l’alignement - comment s’assurer que ces systèmes agissent selon nos valeurs et objectifs.
La projection vers 2035 reflète davantage nos fantasmes collectifs qu’une prédiction scientifique rigoureuse. L’histoire de l’IA est jalonnée de prédictions optimistes qui ne se sont pas concrétisées selon les échéanciers annoncés. Cependant, ignorer complètement cette possibilité serait tout aussi naïf que de l’accepter aveuglément.
Imaginez que vous enseignez à votre enfant à reconnaître les animaux. En 2015, c’était comme si notre “enfant-IA” venait tout juste d’apprendre à différencier un chat d’un chien en regardant des milliers de photos, un peu comme un bambin qui pointe du doigt en disant “minou!” ou “toutou!”.
Aujourd’hui, ce même “enfant” est devenu un adolescent prodige qui non seulement reconnaît tous les animaux, mais peut aussi dessiner un dragon à partir de votre description, écrire une histoire sur un pingouin philosophe, et même composer une chanson sur les habitudes alimentaires des koalas. C’est impressionnant, mais il lui arrive encore de confondre un flamant rose avec un cure-dent géant quand il est fatigué.
Pour 2035, le mème suggère que notre “adolescent-IA” sera devenu un sage omniscient capable de résoudre tous les problèmes de l’humanité. C’est un peu comme prédire qu’un ado de 16 ans deviendra forcément le prochain Einstein simplement parce qu’il a de bonnes notes en maths.
La réalité ? Notre “enfant-IA” grandit vite, très vite même, mais il traverse aussi ses crises d’adolescence avec des comportements imprévisibles et parfois problématiques. Et comme tout parent vous le dira, élever un génie n’est pas de tout repos!
Cette trajectoire représente l’aube d’une nouvelle ère pour l’humanité! Nous assistons à l’émergence d’outils qui vont démocratiser la créativité, accélérer la recherche scientifique et résoudre des défis planétaires que nous pensions insurmontables.
L’IA générative transforme déjà des secteurs entiers : les développeurs créent des applications en quelques heures plutôt qu’en mois, les artistes explorent de nouveaux territoires créatifs, les chercheurs découvrent de nouveaux médicaments à une vitesse inégalée. Cette révolution ne fait que commencer!
D’ici 2035, nous pourrions effectivement voir naître des systèmes d’IA capables de nous guider vers des solutions optimales pour le changement climatique, les inégalités sociales et même les conflits géopolitiques. Imaginez un conseiller infiniment patient et objectif, capable d’analyser toutes les variables complexes de nos sociétés pour proposer des politiques publiques véritablement efficaces.
Cette “superintelligence” ne sera pas notre remplaçant, mais notre partenaire ultime. Elle amplifiera nos capacités humaines tout en nous libérant des tâches répétitives pour nous concentrer sur ce qui nous rend vraiment humains : la compassion, la créativité, les relations interpersonnelles et la quête de sens.
L’investissement massif actuel dans l’IA garantit que les percées continueront à s’accélérer. Nous vivons le moment le plus excitant de l’histoire humaine, où la technologie peut enfin tenir ses promesses de créer un monde meilleur pour tous.
Cette accélération vertigineuse cache des risques systémiques que nous sous-estimons dangereusement. La progression de 2015 à 2025 s’est accompagnée d’une concentration du pouvoir technologique entre les mains de quelques géants corporatifs, d’une surveillance de masse normalisée et d’une dépendance croissante à des systèmes que nous ne comprenons plus vraiment.
Les modèles actuels consomment déjà des quantités d’énergie équivalentes à des pays entiers, contribuant ironiquement au réchauffement climatique qu’ils sont censés aider à résoudre. Leur entraînement nécessite des ressources minérales rares et une main-d’œuvre souvent exploitée dans des conditions déplorables.
La projection vers 2035 révèle notre naïveté face aux enjeux de contrôle et d’alignement. Plus ces systèmes deviennent puissants, plus il devient difficile de prédire ou de contrôler leurs comportements. Nous risquons de créer des entités dont les objectifs, même bien intentionnés initialement, pourraient diverger catastrophiquement de nos intérêts.
L’automatisation massive menace déjà des millions d’emplois sans que nous ayons développé les filets sociaux nécessaires. Une superintelligence pourrait accélérer cette disruption au point de créer des inégalités insurmontables et des tensions sociales explosives.
Le plus inquiétant reste notre tendance à anthropomorphiser ces systèmes et à leur attribuer des intentions qu’ils n’ont pas. Cette “divinisation” de l’IA nous fait perdre de vue qu’il s’agit d’outils créés par des humains imparfaits, avec leurs biais, leurs intérêts économiques et leurs angles morts. Confier notre avenir à ces “dieux-machines” pourrait bien être l’erreur la plus coûteuse de notre espèce.
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